Polytraumatisés, grands brûlés, hémophiles, enfants immunodéprimés… Le plasma, partie liquide du sang, contient des protéines d’un intérêt thérapeutique majeur pour de nombreux malades. Celui-ci leur est délivré par transfusion ou sous forme de médicaments.
90 % du plasma prélevé est destiné à la fabrication de médicaments dérivés du sang, les 10 % restants sont utilisés pour les transfusions dites « thérapeutiques »
L’essentiel du plasma prélevé par l’EFS est adressé au Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies (LFB), établissement sous contrôle de l’Etat, pour être séparé en ses différents éléments : essentiellement l’albumine, les facteurs de coagulation et les immunoglobulines(anticorps). Autant de médicaments qui permettent de soigner chaque année de très nombreux patients.
- L’albumine, qui restaure et maintient le volume sanguin, est largement utilisée pour la prise en charge des grands brûlés, des blessés graves et des patients en réanimation.
- Les immunoglobulines, fabriquées par les lymphocytes B – des globules blancs – reconnaissent les antigènes des virus ou des bactéries sur lesquels elles se fixent pour les détruire. Elles constituent le traitement de fond des patients atteints de déficits immunitaires, en apportant les anticorps nécessaires à la prévention des infections. Elles conditionnent ainsi la survie de nombreuses personnes. Les immunoglobulines sont également utilisées pour traiter les maladies auto-immunes.
Les facteurs de coagulation permettent de traiter des maladies hémorragiques comme l’hémophilie.
Le plasma thérapeutique
- Le plasma sanguin est préparé à partir d’un don de sang ou d’un don par aphérèse – selon un procédé similaire au prélèvement de plaquettes.
On distingue deux types de plasma : le plasma « thérapeutique », destiné à être transfusé à un patient, et le plasma « matière première », qui va servir à fabriquer des médicaments dérivés du sang (ou produits sanguins stables).
Les plasmas thérapeutiques sont conservés à une température inférieure ou égale à -25°C durant au maximum un an après la date de prélèvement.
Depuis 2015, l’EFS produit deux types de plasma thérapeutique pour répondre aux besoins des malades :
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Le plasma viro-atténué par l’amotosalen (psoralène S-59)
L’amotosalen permet de détruire l’ADN et l’ARN des virus. La méthode de viro-atténuation du plasma par amotosalen et exposition aux UVA comprend plusieurs phases successives ; le plasma est notamment filtré de l’amotosalen résiduel et de ses produits de dégradation.
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Le plasma sécurisé par quarantaine
La sécurisation consiste à conserver la poche de plasma pendant au moins 60 jours, dans l’attente d’un second don. Ce délai permet de couvrir la « fenêtre sérologique », période silencieuse après la contamination, durant laquelle un virus, même s’il est présent dans le sang, peut ne pas être détecté par les analyses. Quand un second don est effectué, le plasma issu du précédent don est libéré, si la négativité des tests est confirmée.
L’EFS a relancé cette filière de production à la suite de l’arrêt du plasma inactivé par bleu de méthylène en 2011.
A la suite d’une décision du Conseil d’Etat du 23 juillet 2014, l’EFS ne produit plus de plasma viro-atténué par solvant-détergent, en raison de sa requalification en médicament.
Transfusion de plasmas frais congelés
- Les plasmas frais congelés (PFC) apportent l'ensemble des protéines plasmatiques (en particulier les facteurs de la coagulation et les fractions du complément), même si certaines proteines plasmatiques ont une perte d'activité lors de l'atténuation des agents pathogènes.
- Le plasma est indiqué lors de déficits complexes rares en facteurs de coagulation ou lorsque les fractions coagulantes spécifiques ne sont pas disponibles. Les facteurs de coagulation non disponibles comme médicaments dérivés du sang sont le facteur V, la protéine S et le plasminogène. Le plasma thérapeutique est également nécessaire en cas de déficit en protéines autres que celles de la coagulation telle que la métalloprotéase ADAMTS 13.
- Les plasmas doivent également être prescrits lors d'une hémorragie ou d'un geste à risque hémorragique associé à une anomalie sévère de l'hémostase. Il existe deux types de situation hémorragique :
- Hémorragies aiguës qui vont conduire à une transfusion massive, on la retrouve essentiellement en milieu chirurgical, obstétrical et traumatologique.
- Hémorragie lente, rencontrée tant en milieu médical que chirurgical
Les indications du plasma sont très différentes entre ces deux situations. Dans la première situation, les transfusions de plasma sont réalisées précocemment et exclusivement basées sur la gravité clinique du patient. Pour le second type d'hémorragie, les transfusions de plasma doivent être limitées. L'indication de transfusion de plasma doit être en relation entre des signes cliniques et des résultats biologiques traduisant le déficit en facteurs de coagulation. Les résultats biologiques ne doivent pas être le seul facteur de la décision de transfuser.
En résumé, les indications du plasma thérapeutique sont :
- hémorragie d’intensité modérée, peu évolutive ou contrôlée (guidée en priorité par les tests de laboratoire avec un ratio temps de Quick patient/témoin > 1,5)
- choc hémorragique et situations à risque d’hémorragie massive, en association à des concentrés de globules rouges avec un ratio PFC/CGR compris entre 1/2 et 1/1
- en neurochirurgie en l’absence de transfusion massive (TP < 50 % lors de la surveillance du traumatisé crânien grave et < 60 % pour la pose d’un capteur de pression intracrânienne)
- au cours de la chirurgie cardiaque, en cas de persistance d’un saignement microvasculaire et de déficit en facteurs de coagulation (TP < 40 % ou TCA >1,8/ témoin en présence d’un temps de thrombine normal ou de facteurs de coagulation < 40 %)
- CIVD obstétricale, lorsque le traitement étiologique ne permet pas de contrôler rapidement l’hémorragie
- CIVD avec effondrement des facteurs de la coagulation (TP inférieur à 35-40 %), associée à une hémorragie active ou potentielle (acte invasif)
- micro-angiopathie thrombotique (purpura thrombotique thrombocytopénique et syndrôme hémolytique et urémique avec critères de gravité) :
- en cas de déficit en un facteur de la coagulation et impossibilité d’obtenir rapidement une préparation de facteur purifié, dans le cadre d’une situation d’urgence hémorragique,
- en tant que produit de substitution et non de remplissage vasculaire, chez les patients sans facteur de risque hémorragique traités par des échanges plasmatiques rapprochés
- chez le nouveau-né et l’enfant, les indications sont similaires à celles de l’adulte. Chez l’enfant de moins de 29 semaines de gestation en détresse vitale, la transfusion de PFC est recommandée lorsque les facteurs de coagulation sont inférieurs à 20 %, même en l’absence de syndrôme hémorragique clinique
- en cas de surdosage grave en AVK, dans deux rares situations : absence de concentrés de complexe prothrombinique (CCP) et absence de CCP ne contenant pas d'héparine en cas d’antécédents de TIH.
L’utilisation de plasma thérapeutique n’est pas recommandée dans les situations suivantes :
- comme prophylaxie du saignement en cas d’altération mineure ou modérée de l’hémostase
- comme soluté de remplissage en cas de brûlures
- en cas de chirurgie cardiaque, en l’absence d’un saignement
- en cas d’insuffisance hépatocellulaire chronique, en l’absence de saignement
- en cas d’insuffisance hépatique aiguë sévère, chez un sujet ne saignant pas et non exposé à un geste vulnérant, dans le seul but de corriger les anomalies de l’hémostase
- en cas de poussées aiguës d’oedème angioneurotique héréditaire (OAH)
- en cas d’hémorragie associée aux nouveaux anticoagulants oraux, il n’y a pas de données cliniques justifiant l’intérêt d’une transfusion de PFC dans le seul but d’antagoniser leurs effets
- chez l’enfant et chez le nouveau-né en cas de :
- syndrôme hémolytique et urémique typique post-diarrhéique (STEC+),
- infection néonatale sans CIVD, à titre de traitement adjuvant au traitement antibiotique
- hypovolémie sans syndrôme hémorragique et sans trouble de l’hémostase
- prévention des hémorragies intraventriculaires du prématuré en l’absence de coagulopathie
- avant acte chirurgical (nouveau-né).